Il y a quelques années, les Zapéro-contes furent créés à Bruxelles, pour répondre à la raréfaction des scènes ouvertes dans la capitale. A l’exception de celle organisée, à l’époque, à l’Atelier 210, par le groupe des Chiconteurs, aujourd’hui hélas disparu, il était bien difficile de trouver une scène ouverte digne de ce nom, c'est-à-dire acceptant sans ostracisme tant les conteurs professionnels que ceux en devenir.
L’expérience des années nous a montré que c’était avec raison qu’il fallait promouvoir une telle structure. Car elle s’avère être à la fois un outil précieux pour le conteur mais aussi un puissant moyen de promotion pour le conte.
On le sait, cette discipline artistique souffre encore et toujours de clichés réducteurs. La scène ouverte joue à cet égard un rôle de révélateur auprès de spectateurs qui, bien souvent, se trouvent dans l’ignorance d’un univers aux milles facettes créatives. Elle atteste aussi de l’existence de formidables porteurs de paroles qui n’ont rien à envier à leurs coreligionnaires, les comédiens de théâtre.
« C’est une formidable découverte ! ».
Cette phrase de spectateurs, entendue cent fois, mille fois, à l’issue d’une immersion de 90 à 120’ dans le monde du conte en compagnie d’une dizaine de conteurs différents, est la récompense répétée qui consolide notre conviction de l’utilité d’un tel espace d’expression. Les clichés, les aprioris sont balayés et le spectateur conquis affirme aussitôt sa volonté de retenter l’expérience.
Oserions-nous dire que, pour son plus grand bien, un spectateur ayant, lors d’une scène ouverte, découvert la richesse du conte est presque toujours un spectateur définitivement « cont(e)aminé » ?..
L’autre intérêt de la scène ouverte se trouve dans son usage, comme un outil pour le conteur.
C’est d’abord un instrument de promotion, bien évidemment, pour se faire connaître et reconnaître. Mais c’est surtout une opportunité précieuse pour évaluer son travail, faire le point sur son cheminement, se remettre en question…
Car la scène ouverte est un lieu d’expression dans lequel, le doute, le droit à l’erreur, l’expérience nouvelle sont permis, à l’inverse d’un spectacle complet qui exige de l’artiste une cohérence totale dans sa démarche et une pratique sans faille de son art.
Les grands conteurs ont compris depuis longtemps l’importance de s’y produire, de temps à autre. Ils viennent s’y nourrir, en amont d’un spectacle à venir, ou en complémentarité d’un temps de recherche, de réflexion sur leur art.
Pour le conteur en devenir, l’intérêt est plus évident encore. C’est d’abord le moment des premiers succès, parfois des premiers échecs qui sont tout aussi formateurs. Sorti du cocon du stage, il s’offre un « vol d’essai », sans être sous l’œil de son formateur mais bien face à un vrai public. Lui vient, ensuite, l’occasion de se donner des objectifs. Venir raconter une nouvelle histoire, tous les mois ou tous les deux mois, trouver petit à petit le conteur qu’il est vraiment, se créer un répertoire.
Cerise sur le gâteau, il s’offre l’opportunité d’un « retour sur son travail » lors d’échanges conviviaux avec ceux qui évoluent dans la discipline de manière professionnelle ou semi-professionnelle.
Nombre de conteurs et conteuses peuvent témoigner de cette expérience enrichissante.
Insensibles au dédain de ceux qui ne peuvent comprendre l’intérêt d’une formule absolument ouverte à tous, les Zapéro-contes se sont lentement imposés avec l’aide de conteurs généreux, ouverts, talentueux et bénéficient d’un incontestable succès public.
Voulant démultiplier ce formidable outil qu’est la scène ouverte telle que nous la concevons, nous avons décidé de concrétiser, pour la saison 2014-2015, notre envie d’implanter aussi les Zapéro-contes dans le Brabant Wallon. Sans volonté de concurrence avec les belles initiatives qui y existent déjà mais bien avec un souci de réelle complémentarité.
C’est une équipe de conteuses issues de la région, et bien sûr membres de Racontance, qui animeront et porteront ce nouveau projet appelé à se développer à Louvain-la-Neuve.
Nous avons l’espoir de nouveaux échanges, de nouvelles rencontres, de nouvelles joies à partager avec tous ceux qui donnent au conte ses lettres de noblesse et, bien évidemment, avec un public de plus en plus large, de plus en plus curieux, de plus en plus conquis. -Dbr